Alousseni Sanou, le discret et multi-talentueux ministre de l’Économie et des Finances du Mali, est le personnage clé du système mis en place par les autorités militaires de la transition pour contourner les sanctions infligées contre le pays.
Le tacticien de la riposte
Inconnu du microcosme politique malien– tout comme de l’opinion –, réputé très proche des colonels Assimi Goïta et Sadio Camara, Alousseni Sanou est en première ligne du bras de fer qui oppose le pays aux occidentaux et aux chefs d’Etat de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Entré au gouvernement pour la seconde fois au poste de ministre de l’Économie, après le second coup d’Etat opéré par Goïta, l’homme de 58 ans a su permettre au secteur agricole de redécoller malgré tous les défis en poursuivant une politique de soutien au secteur rural notamment à travers la subvention des intrants et la mécanisation de l’agriculture. Le Produit Intérieur Brut (PIB) réel malien a donc progressé à pâtir de 2021, avec une croissance estimée à 3,1 % contre -1,2% en 2020, tirée par la reprise dans les secteurs agricoles et des services. Une résilience économique qui permet aujourd’hui à l’État malien d’honorer – malgré l’embargo – le paiement des salaires des agents publics et de faire face aux dépenses de fonctionnement.
Tête pensante et Geek parmi les militaires
Discret, peu bavard en public, pas du tout à l’aise face aux caméras, prudent, mais très influant, le brillant technocrate à qui, Assimi Goïta, a confié en partie à la mission de riposter aux sanctions économiques de la CEDEAO est qualifié par ses anciens collaborateurs de Banque Nationale de Développement Agricole (BNDA) dont il a assuré entre 2017 et 2019 les intérims du Président Directeur Général et du Directeur Général, tel « un homme pétri de talents, compétent, humble, rigoureux et probe ». Sanou fait partie des éminentes personnalités du Mali qui participent aux rencontres nocturnes qui se tiennent à Kati dont il est originaire et au cours desquelles les militaires au pouvoir définissent leur stratégie.
L’argentier du régime
Titulaire d’une Maitrise en Sciences Économiques obtenue à École Nationale d’Administration du Mali en 1987, et de plusieurs formations de spécialisation, entre autres, en Contrôle de Gestion à Tours en France en 1995; de Courtier en Bourse à Institut Canadien de Bourse à Abidjan en Côte d’Ivoire en 1995 et en Monétique à SOPRA à Montpellier France en 2005; Alousseni Sanou est le grand mécène de la transition.
Le jeune banquier est à la manivelle pour conduire les banques à prendre en charge certaines demandes du gouvernement. Aux rangs de celle-ci figure une « interdiction formelle aux banques de geler les comptes de l’état » et de « communiquer les positions de l’Etat » domiciliées dans leurs livres de comptes.
Sous la houlette de celui qui est même vu par tel un potentiel successeur de Choguel Kokalla Maïga, dans l’éventualité où il devra céder sa place, il est « hors de question que les banques commerciales bloquent les comptes de l’État et de ses démembrements ».